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Discours de son Excellence

le Président de la République Libanaise

le Général Emile LAHOUD

Sommet  Mondial de la Société de l’Information

Genève – 2003 –

 

Mesdames et Messieurs les chefs d’Etats et de gouvernements,

Monsieur le Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies

Mesdames et Messieurs,

L’avènement de la société de l’information auquel nous consacrons ce sommet est, pour notre planète, un moment capital qu’il importe, pour en mesurer les implications, de placer dans sa perspective historique.

Il est le troisième temps d’une longue évolution inaugurée, il y a quelque dix millénaires, dans les plaines fluviales du Moyen-Orient. Là, la révolution agricole, en faisant de l’homme chasseur un cultivateur, fut l’acte fondateur de notre civilisation. Portée par le labeur des hommes – « tu gagneras ton pain à la sueur de ton front » – l’économie rurale qu’elle établit eut pour corollaire politique l’ordre impérial et féodal qui, jusqu’à la révolution industrielle, régit la plus grande partie du monde alors connu. Ses autres corollaires furent hélas l’esclavage puis le servage.

Maîtrisant des énergies nouvelles, la révolution industrielle du XVIIIe siècle transforma, par la machine, le travail: n’étant plus synonyme de labeur physique, il cessa d’être une malédiction et, pour la première fois, l’humanité connut l’abondance. Elle découvrit par là-même la liberté. Sur les ruines des empires morts, les nations industrielles firent l’apprentissage de la démocratie qui se consolida lorsque, corrigeant les injustices inhérentes aux excès du libéralisme, la social-démocratie instaura un capitalisme à visage humain.

Fondé sur un partage plus équitable de la prospérité à l’intérieur des nations industrielles, cet ordre resta l’apanage de ces nations même. Le reste du monde en fut malheureusement exclu. Sans aller jusqu’à dire, comme le firent certains, que la relation est causale entre la richesse des uns et la pauvreté des autres, et que le développement de ce qu’on appelle le Nord fut historiquement le résultat de l’exploitation du Sud, reconnaissons que, pour l’essentiel, ce dernier fut longtemps privé des bienfaits de la révolution industrielle.

Les techniques nouvelles de l’information, qui permettent la dématérialisation et la délocalisation de l’activité économique, ouvrent aujourd’hui aux peuples jusque-là défavorisés un avenir meilleur. Mais une profonde fracture continue d’opposer le monde des nantis à celui où plus d’un milliard d’hommes vivent avec un dollar par jour, boivent une eau non potable et n’ont pas d’accès aux moyens modernes de communication.

En elles-mêmes, les technologies de la production et de la communication numériques sont neutres. Elles peuvent libérer du sous-développement des régions jusque-là maintenues en marge du progrès, comme elles peuvent exponentiellement accroître l’avance des plus puissants, aggraver le désespoir des plus déshérités.

C’est dire que, livrée aux seules lois du marché, la mondialisation ne peut que produire plus d’inégalité et rendre les déséquilibres économiques et sociaux plus profonds chaque jour. Sur le plan culturel, elle peut être synonyme d’uniformisation au profit d’un modèle dominant et laminer d’autres cultures dont la diversité fait pourtant la richesse du monde.

Aux abus du libéralisme débridé, les Etats nationaux apportèrent jadis des correctifs par le réformisme économique et social, réconciliant l’initiative privée et une direction démocratique de la société. Cette synthèse sous l’égide de l’Etat fut possible parce qu’elle s’effectua dans un contexte historique où l’espace économique et l’espace politique coïncidaient.

Ce temps est dans une large mesure révolu. Si les lois du marché ont pu, dans le cadre national, être maîtrisées, humanisées, c’est qu’il existait dans ce cadre une autorité politique ayant pouvoir de le faire. Dans le cadre mondial actuel où les techniques de l’information nous ont projetés, cette autorité est encore incertaine et nulle puissance, si grande soit-elle, ne saurait unilatéralement la remplacer.

Ce rejet de l’unilatéralisme est une des constantes de la politique de mon pays, le Liban et de la Ligue des Etats arabes dont il est un des fondateurs. Il nous dicte notre attachement à l’Organisation des Nations Unies, dont je félicite ici le Secrétaire Général, Monsieur Kofi Annan, pour l’organisation de ce sommet.

Nous sommes à cet égard en pleine harmonie avec l’Organisation Internationale de la Francophonie que j’ai actuellement l’honneur de présider et dont je salue le Secrétaire Général, le Président Abdou Diouf. Je voudrais ici rappeler les résolutions de la Conférence Ministérielle de la Francophonie sur la Société de l’Information, tenue à Rabat en Septembre dernier. S’inspirant d’une conception pluraliste de l’information et réaffirmant la nécessité de la diversité culturelle et linguistique, ces résolutions constituent une précieuse contribution aux travaux de notre sommet.

Mesdames et Messieurs,

La population libanaise se caractérise par un niveau élevé d’éducation et par le multilinguisme lié à notre position géographique ainsi qu’à la structure de notre économie où prédominent les services et l’échange. Elle est ainsi naturellement prédisposée aux métiers de l’information. Un grand nombre de nos entreprises s’y consacre. Certaines agissent même en partenariat avec de grands groupes internationaux.

Ces entreprises animent de larges secteurs – la banque, l’assurance, le commerce, le tourisme, le transport, la communication – qui se distinguent traditionnellement chez nous par leur dynamisme et leur efficacité.

Convaincu de la nécessité de mettre le secteur public en phase avec le secteur privé, l’Etat libanais a engagé une réforme administrative dont la pierre angulaire est l’informatisation, condition nécessaire de la bonne gouvernance et de la modernité.

Celles-ci ne peuvent s’établir que dans la paix, dont le Liban et l’ensemble de sa région sont, hélas ! depuis des décennies, privés.

Les principes de cette paix, rappelés lors du sommet arabe de Beyrouth en Mars 2002, sont, en ce qui concerne le conflit israélo-arabe, clairs : retrait israélien de tous les territoires occupés jusqu’aux frontières du 4 juin 1967, ainsi que des zones encore occupées du Liban-Sud ; acceptation par Israël d’un Etat palestinien souverain et indépendant sur les Territoires palestiniens occupés depuis le 4 juin 1967 en Cisjordanie et sur le territoire de Gaza avec Jérusalem pour capitale conformément à la résolution 1397 du Conseil de Sécurité ; solution au problème des réfugiés palestiniens conformément à la résolution 194 des Nations Unies et refus de leur implantation dans les pays d’accueil.

J’insiste sur le refus de l’implantation des Palestiniens au Liban. Violation flagrante du droit international, cette implantation  signifierait l’abandon par les Palestiniens de leur patrie et liquiderait tout espoir de paix durable au Moyen-Orient. Déstabilisant gravement le délicat équilibre économique et démographique de mon pays, elle contredirait enfin notre constitution telle qu’amendée par l’accord de Taëf conclu en 1989 avec l’aval des Nations Unies et des grandes puissances, notamment les Etats-Unis.

En ce qui concerne la crise irakienne, les évènements prouvent à l’évidence qu’elle ne saurait trouver sa solution que par une restauration de la souveraineté de ce pays dans le cadre du droit international et du rétablissement de la compétence des Nations-Unies.

Mesdames et Messieurs,

La démocratie, la bonne gouvernance et la modernité ne sauraient être importées, et moins encore imposées, de l’extérieur. Elles ne sauraient être que le fruit de la libre volonté des peuples affranchis de la peur, de la guerre et de l’occupation.

Je vous remercie.

 

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Mis à jour le 2003-12-10