DÉCLARATION DE MADAME SHIRIN EBADI
Présidente de « the Defenders of Human Rights Center »
au nom de « the Civil Society » International Federation for Human rights
16 Novembre 2005
Honorable Présidence du Sommet,
Monsieur Kofi Annan,
Mesdames et Messieurs les Hauts Représentants,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très honorée de représenter les ONG et la société
civile devant cette assemblée.
J’espère que l’Organisation des Nations Unies se
renforcera jour après jour en prenant de plus en plus en compte les
organisations représentatives de la société civile. Ceci est d’autant plus
nécessaire lorsque certains gouvernements ne sont pas réellement élus par
leurs peuples et ne respectent pas la volonté et l’intérêt de leur peuple
dans les décisions qu’ils prennent sur le plan international.
Toutefois, il faut également agir en sorte que les
gouvernements non démocratiques ne puissent pas manipuler les prises de
décisions dans les instances internationales en envoyant des « ONG » qu’ils
ont eux-mêmes créées et qui transmettent de fausses informations sur la
situation dans leur pays.
Il ne faut pas oublier que les gouvernements doivent être
au service des peuples et il n’est pas concevable de croire que les Hommes
naissent pour être dominés par des gouvernants qui prennent des décisions
qui ne recueillent pas leur consentement.
Mesdames, Messieurs,
Nous vivons à une époque où l’accès à l’information est
le principal vecteur du développement et du progrès et d’avenir. C’est la
raison pour laquelle la fracture numérique existant entre les pays
industrialisés et les pays en voie de développement va créer un fossé
croissant entre les riches et les pauvres, tant au niveau national qu’au
niveau international.
L’avènement du progrès de la société de l’information a
d’une part créé une occasion en or pour le développement et l’amélioration
du niveau de vie de l’humanité, mais a d’autre part accentué la fragilité
des pays non industrialisés. C’est ainsi que les peuples qui sont les
utilisateurs principaux et finaux de ces systèmes d’information doivent
payer le prix de l’incurie de leurs gouvernements qui ne sont pas attentifs
à cet important enjeu et n’investissent pas suffisamment dans ce domaine.
Par exemple, si nous examinions le budget militaire des
Etats, que ce soit des pays développés ou des pays pauvres, nous
constaterions qu’en diminuant les budgets militaires, la fracture numérique
pourrait être considérablement réduite.
Par ailleurs, les pays industrialisés doivent également
apporter leur contribution à l’humanité en aidant les pays non développés.
Trente pays développés dans le monde qui regroupent
seulement 16% de la population mondiale, dépensent annuellement 750
milliards de dollars pour leurs budgets militaires alors que nous n’avons
besoin que de 100 milliards de dollars pour sortir, d’ici 2010, les pays non
développés de la pauvreté informatique et pour remettre les infrastructures
informatiques et de télécommunication de ces pays à un niveau acceptable.
Si nous regardons le monde comme un petit village, nous
devons tous profiter de ses bienfaits et notamment du savoir ; il n’est pas
possible d’avoir une prétention universaliste et de maintenir la majeure
partie du monde dans la pauvreté d’information.
L’autre sujet qui nous préoccupe est le contrôle des
fournisseurs d’accès et de l’Internet qui se situent dans des pays
occidentaux. Les populations du reste du monde qui sont les principaux
utilisateurs d’internet se posent la question suivante : Quelle garantie
existe-t-il pour que les gouvernements de ces pays ne puissent, à tout
moment, pour des raisons politiques ou d’embargo économique, priver une
partie de la population mondiale de l’accès à Internet ?
Un autre problème auquel les peuples, c’est-à-dire les
principaux acteurs de l’internet, sont confrontés est la censure. Certains
gouvernements, au prétexte du maintien de la sécurité nationale, de la lutte
contre la corruption morale ou encore pour empêcher des commerces illicites,
procèdent au filtrage d’Internet, définissent les sites qu’ils souhaitent
filtrer de manière discrétionnaire et empêchent les gens d’accéder
facilement à l’information dont ils ont besoin ou de faire entendre leurs
voix à l’extérieur. Pire encore, ils procèdent à la répression des auteurs
de blog qui expriment la moindre critique à l’égard de leur gouvernement.
Malheureusement, dans certains pays, les défenseurs des
droits de l’Homme, les écrivains et les traducteurs sont emprisonnés, tout
simplement coupables d’avoir exercé leur liberté d’expression et d’opinion.
Ici, en tant que représentante des ONG, tout en demandant la libération des
prisonniers politiques et d’opinion et de toutes les personnes détenues pour
avoir exercé leur liberté d’expression, je propose de créer un Comité sous
la supervision de l’ONU avec la participation des représentants du Haut
Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, l’UNESCO, le PNUD et
l’UIT ainsi qu’un ou plusieurs représentants des ONG pour veiller au
problème du filtrage des sites Internet, pour éliminer les difficultés que
j’ai mentionnées et empêcher que les Etats ne sacrifient les intérêts de
leurs peuples à des arrangements politiques.
Dans cet espoir,
Je vous remercie
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