DÉCLARATION DE Dr. Francis MUGUET
LABORATOIRE DU DÉVELOPPEMENT DE L'INFORMATION SCIENTIFIQUE
DE L'ENSTA
18 novembre 2005
Excellences, Mesdames, Messieurs
Notre rapport, où nous n'allons pouvoir évoquer que
certains aspects, concerne les événements multi-acteurs
suivants : Libre Accès à l'Information Scientifique,
événement du Groupe de Travail sur l'Information
Scientifique4 ; Logiciels Libres, événement du Groupe de
Travail sur les Brevets, les Droits d'Auteur et les
Marques5; plusieurs événements6 organisés ou co-organisés
par la Famille Education et Recherche7 Ingénierie, société
du savoir et les défis du 21ème siècle, événement de la
Fédération. Mondiale des Organisations d'Ingénieurs8; Impact
des réseaux à haut débit sur l'échange de contenu
scientifique et technique, événement organisé par le centre
Khawarizmi9 ; Les TIC et le partage du savoir scientifique
organisé par l'Association Tunisienne d'Aide à la Recherche
Scientifique sur le Net10.
Concentrons nous, en quelques minutes, sur l'essentiel :
Tout d'abord, en ce qui concerne le Libre Accès à
l'Information Scientifique, il faut souligner que, ce qui
est souvent ignoré tant du public que de ceux qui nous
gouvernent, les scientifiques donnent gratuitement les
rapports de leurs coûteuses recherches à des revues et que
leurs travaux sont ensuite examinés et validés gratuitement
par leurs pairs.
Cependant, l'accès à ces revues est d'un prix exorbitant,
créant un fossé numérique au niveau même des contenus.
Comme l'a souligné un des intervenants, en Médecine,
l'absence de Libre Accès au journaux scientifiques a
certainement entraîné la perte de nombreuses vies humaines.
On ne tue cependant pas que des personnes, on aussi tue
des emplois. Ainsi, lorsque les entreprises, petites ou
grandes, sont privées d'accès à ces ressources financées sur
fonds publics et philanthropiques dans le but de contribuer
à la croissance économique. De nombreuses possibilités de
développements technologiques sont supprimées dans l'oeuf.
Il est donc paradoxal de demander à la Science d'être
l'ultime recours pour faire face aux défis d'un monde en
sérieuse difficulté, sans que le Libre Accès ne soit mis en
oeuvre, d'une manière aussi rapide qu'efficace.
Cette situation absurde et dangereuse est née d'une
évolution historique qui ne doit pas perdurer dans la
nouvelle Société de l'Information, qui doit devenir une
Société de la Connaissance et des Savoirs Partagés.
La solution à cette situation est très simple: il suffit
de changer les critères actuels d'appréciation, qui forcent
les scientifiques à publier dans d'anciennes revues
prestigieuses qui sont tombées dans le giron d'intérêt
financiers. Une condition de financement des travaux de
recherche doit être la publication au travers de ressources
libres. Des économies considérables seront réalisées dans
les pays développés, tandis que sera supprimé cet étau qui
étouffe complètement les efforts scientifiques des pays en
développement. C'est une situation gagnant/gagnant.
Concernant l'Education, il est assez évident que le Libre
Accès aux ressources Educatives constitue une clef du
développement au niveau mondial, dans tous les domaines de
l'activité humaine, dans le respect de la diversité
culturelle et linguistique.
Enlever les barrières qui limitent l'accès aux outils
logiciels qui sont eux-mêmes requis pour accéder aux
contenus est une nécessité évidente et urgente. Il est
nécessaire aussi que soit rendue possible une
inter-opérabilité libre de droits.
Concernant la mise en oeuvre des recommandations du
Sommet, on cite souvent les partenariats multi-acteurs. Il
serait temps que les Nations Unies se penchent sur la
question de leur fournir un cadre juridique international.
Une proposition concrète en ce sens existe11. Cela permettra
de limiter les excès de certains quasi-monopoles. Cela
permettra aussi la création de partenariats sains tant au
service du développement durable que d'une gouvernance
multi-acteurs.
Une des originalités d'ailleurs du Sommet a été la
naissance et la reconnaissance du Fonds de Solidarité
Numérique1213 comme mécanisme de financement volontaire,
alternatif et multi-acteurs. Dans ce contexte, il a été
proposé un nouveau mécanisme de financement alternatif 13.
Il est fondé sur la notion d'obligation naturelle. Les
entreprises et entités qui réalisent des économies
substantielles grâce à l'utilisation de Logiciels Libres
devraient se sentir obligées de verser volontairement un
pourcentage de ces économies, qui serait affecté au
financement des projets de Logiciels Libres pour combler le
fossé numérique.
Ainsi, à l'aide de ces initiatives et propositions, et si
la Société Civile qui a contribué au long processus
préparatoire est vraiment incluse dans l'organe de
coordination du suivi, peut-être que le Sommet marquera une
évolution majeure dans l'histoire des Nations Unies et de ce
monde troublé.
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