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Réseaux de prochaine génération
Sous le signe de la convergence
La convergence entre la
radiodiffusion, l'informatique et les télécommunications est une
réalité et elle change la nature des services de communications
et des réseaux sur lesquels ces services sont acheminés. Elle
est, dans une large mesure, dictée par le passage aux réseaux de
prochaine génération (NGN) qui constituent une nouvelle
architecture reposant sur le protocole Internet (IP) susceptible
d'unifier réseaux fixes, réseaux mobiles et radiodiffusion.
Les réseaux NGN peuvent utiliser
diverses technologies, notamment la fibre optique (voir
Vive la fibre optique), le satellite, le câble, les technologies
hertziennes fixes ou mobiles ou ils peuvent être le résultat
d'une modernisation des réseaux en fils de cuivre existants. Un
certain nombre d'entreprises déploient déjà des réseaux NGN dans
les pays développés, notamment au Japon, en République de Corée,
et dans certaines parties des Etats Unis et de l'Europe
occidentale. L'UIT prévoit que dans un certain nombre de pays
développés, tous les réseaux de lignes fixes seront des réseaux
NGN d'ici à 2012 et qu'il en ira de même pour les réseaux
mobiles à l'horizon 2020. Les pays en développement cherchent
eux aussi à déployer des réseaux NGN, essentiellement en
utilisant des technologies hertziennes large bande. L'accès aux
télécommunications dans les zones rurales et isolées de ces pays
pourrait ainsi être considérablement amélioré.
A cet égard, l'UIT joue un rôle
essentiel dans la réglementation du spectre des fréquences
radioélectriques. Elle dirige actuellement l'une des plus
grandes initiatives jamais lancées en matière de normalisation
technique, l'initiative NGN-GSI (Next-Generation
Network Global Standards Initiative, initiative relative
à la normalisation mondiale des réseaux de prochaine
génération), qui consiste essentiellement à élaborer une feuille
de route à l'échelle mondiale pour les technologies et les
services, et partant, définir l'environnement numérique de
demain. Le Bureau de développement des télécommunications de
l'UIT pour sa part étudie l'état d'avancement du déploiement des
réseaux NGN dans les différentes régions du monde et réfléchit
aux conséquences du passage à ces réseaux sur la réglementation.
Les réseaux NGN promettent une
connectivité mondiale transparente, quels que soient le réseau
et le dispositif, à tout moment et en tout lieu. De nouveaux
acteurs (des fournisseurs de services de télévision par câble,
de services Internet large bande, des opérateurs de réseaux
virtuels notamment) ont ainsi commencé à s'aventurer sur des
territoires qui traditionnellement étaient la chasse gardée des
entreprises de télécommunication et des radiodiffuseurs publics.
Certaines entreprises proposent de plus en plus des packs
«triple-play» offrant téléphonie, accès Internet et
divertissement sur une seule et même connexion.
Figure 1 — La VoIP et la TVIP, moteurs de la croissance des
réseaux NGN
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Abonnés aux services TVIP de
détail (en millions, 2008) — les 10 premiers du
classement |
Source: ILOCUS. |
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La TVIP dans le monde (en
milliers d'abonnés) — les 10 premiers exploitants |
Source: Lightreading. |
La nouvelle norme de TVIP favorise le
déploiement à l'échelle mondiale
Dans de nombreux pays, la téléphonie sur
Internet (VoIP) et la télévision sur Internet (TVIP) jouent un
grand rôle pour le développement des réseaux NGN (voir la Figure
1). Les téléspectateurs qui ont la TVIP ont tout loisir de
choisir le moment, le lieu et l'appareil — poste de télévision
classique, ordinateur portable ou téléphone mobile de troisième
génération (3G) — sur lequel ils pourront voir leur émission.
Ils peuvent aussi partager des fichiers avec des amis ou les
membres de leur famille puis les mettre en ligne sur Internet
pour que d'autres utilisateurs puissent les télécharger. D'une
certaine façon, ils deviennent eux-mêmes des radiodiffuseurs.
Une étape importante pour la TVIP a été
franchie en février 2009 avec l'approbation d'une nouvelle norme
UIT, la Recommandation UIT–T Y.1901. Cette Recommandation est le
fruit des efforts déployés au niveau international dans le cadre
de l'initiative IPTV-GSI (Internet
Protocol Television Global Standards Initiative,
initiative de normalisation mondiale de la télévision sur
Internet) de l'UIT, avec la participation active des
fournisseurs de services et des équipementiers de nombreux pays.
Les normes sont essentielles pour le
déploiement de la TVIP à l'échelle mondiale. Une deuxième
génération de services de TVIP pourrait être concernée par une
modification de la réglementation ou une évolution de la demande
sur le marché qui nécessiteront l'interaction des fournisseurs
de services et/ou l'interfonctionnement des réseaux. Une des
conséquences pourrait être que le consommateur pourrait acheter
un décodeur de TVIP, s'abonner auprès d'un opérateur de réseau
et enfin accéder aux services proposés par divers fournisseurs
de services à des tiers. La normalisation de l'environnement de
la TVIP pourrait signifier la fin des «chasses gardées», les
abonnés ne pouvant accéder qu'aux contenus proposés par un seul
et même fournisseur de services.
Réglementation
Les réseaux NGN facilitent la fourniture
des contenus et des services mais posent par ailleurs des
problèmes complexes aux régulateurs. Avant la convergence qui a
transformé le paysage des technologies de l'information et de la
communication (TIC), chaque service était acheminé sur un réseau
distinct optimisé pour ce service. Aujourd'hui, les bits et les
octets numériques qui transitent sur les réseaux IP
s'entremêlent et il est difficile de distinguer un service d'un
autre sur ces réseaux. Il est urgent de hiérarchiser le trafic
pour garantir la qualité des services et le problème est
complexe. Dans un monde dominé par les réseaux NGN, y a-t-il
lieu de réglementer différemment des trains binaires différents
et si oui, comment?
Les individus étant aux commandes aussi
bien en tant que consommateurs que, de plus en plus, en tant que
créateurs de contenus, les pouvoirs publics peuvent-ils exercer
un quelconque contrôle pour éviter que des contenus choquants ou
dangereux ne soient largement diffusés? Les droits d'auteur, la
publicité ou la protection des consommateurs sont autant de
questions qui peuvent susciter des controverses dans le monde en
ligne où les contenus sont diffusés instantanément. Les
conséquences peuvent être énormes sur le plan commercial. Par
exemple, dans le monde de la musique, l'ancien modèle de
distribution des contenus change, tellement il est facile de
télécharger à peu de frais (parfois de façon illégale) des
morceaux de musique depuis l'Internet.
Les réglementations clairement définies
qui jusqu'à présent régissaient les sphères des
télécommunications et de la radiodiffusion entrent en conflit
avec les valeurs de l'autoréglementation prônées par la
communauté des internautes qui jugent les contenus et les
applications en fonction de leur intérêt et de leur utilité pour
les utilisateurs.
Le Forum mondial des politiques de
télécommunication qui s’est tenu à Lisbonne (Portugal), du 22 au
24 avril 2009, a rassemblé des délégués du secteur des TIC qui
ont débattu des questions de politique générale et de
réglementation que soulève le déploiement des réseaux NGN.
Investir dans le large bande ultra rapide
Une caractéristique essentielle des
réseaux NGN est qu'ils peuvent offrir un accès Internet large
bande, l'une des évolutions les plus intéressantes ces dernières
années dans le secteur des TIC. Le passage de l'accès commuté
aux services large bande a eu un impact phénoménal aussi bien
sur les consommateurs que sur les entreprises. Et nous sommes
aujourd'hui à la veille d'une nouvelle évolution, le passage au
large bande «ultra rapide» ou à très haut débit.
Pour les particuliers, le large bande
ultra rapide permettra aux différents membres d'une famille
d'avoir accès simultanément à de multiples services de large
bande, par exemple regarder un programme de télévision haute
définition (TVHD), jouer à des jeux interactifs en ligne,
diffuser en continu ou télécharger des morceaux de musique, des
programmes de télévision ou des films sur Internet. Les
entreprises, quant à elles, pourront utiliser des services
simultanés comme les communications vidéo bidirectionnelles ou
l'extraction améliorée des données.
Pour accélérer la fourniture du large
bande ultra rapide qui va transformer nos économies, certains
pays contribuent, en pleine crise financière, au financement des
réseaux NGN actuellement construits ou en projet. Le
Gouvernement australien, par exemple, a annoncé le 7 avril 2009
le lancement d'un projet, de 43 milliards de dollars
australiens, pour la construction et l'exploitation d'un nouveau
réseau large bande national ultra rapide. Ce devrait être le
plus gros projet d'infrastructure jamais entrepris en Australie.
Il permettra:
- d'offrir à 90% des foyers, écoles
et lieux de travail australiens des services large bande, à
des débits allant jusqu'à 100 Mbit/s, soit 100 fois plus
rapides que ceux qu'utilisent actuellement de nombreux
particuliers et de nombreuses entreprises;
- de connecter les 10% restants grâce
à des technologies hertziennes et satellitaires de prochaine
génération qui offriront des débits large bande de 12
Mbits/s;
- de créer directement jusqu'à 25 000
emplois locaux chaque année en moyenne sur les huit années
que durera le projet.
Ce nouvel investissement constitue aussi
la plus grande réforme des télécommunications australiennes
depuis deux décennies car elle consacre la séparation entre le
fournisseur d'infrastructures et les fournisseurs de services de
détail. Il en résultera un accès aux infrastructures meilleur et
plus équitable pour les fournisseurs, une plus grande
concurrence entre détaillants et de meilleurs services pour les
familles et les entreprises.
LG
Les réseaux à fibres optiques
devraient prendre en charge la nouvelle génération de
dispositifs — depuis les postes de télévision jusqu'aux
lecteurs de DVD — qui arrivent actuellement sur le marché.
Les opérateurs de TVIP pourront offrir des services
interactifs, par exemple des jeux en ligne et des films en
3D que l'on pourra télécharger et visionner directement dans
son salon.
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Etudes de cas
Le passage aux réseaux NGN peut prendre
de multiples formes. La diversité des plans et des activités des
opérateurs conduit à des solutions réglementaires différentes.
Dans certains pays, les régulateurs et les pouvoirs publics
laissent aux acteurs du marché le soin de décider quand et
combien investir; dans d'autres pays, comme le Portugal, les
pouvoirs publics dégagent des lignes de crédit pour le
déploiement de réseaux large bande de prochaine génération. Les
études de cas ci après illustrent la diversité des situations
rencontrées.
Autriche
C'est en 2004 que
Telekom Austria, l'opérateur historique du pays, a
commencé à installer l'infrastructure centrale pour les réseaux
NGN. A la fin de cette année-là, l'opérateur avait investi 780
millions d'euros et prévoyait d'investir un montant similaire
sur cinq ans.
Telekom Austria utilise depuis plusieurs années le mode
de transfert asynchrone (ATM) et la technologie IP pour
acheminer le trafic téléphonique longue distance national. Elle
prévoit d'amener la fibre optique jusqu'au trottoir, avec la
coopération des diverses municipalités et entreprises d'utilité
publique et a opté pour une attitude attentiste en ce qui
concerne le déploiement de l'accès aux réseaux NGN.
Dans le même temps,
Wienstrom, le plus gros fournisseur d'électricité
autrichien, offre à d'autres opérateurs un accès large bande à
fibres optiques. Il a amené la fibre optique jusqu'à 10 000
foyers et prévoit d'en connecter 50 000 autres d'ici fin 2009.
Son objectif final est de raccorder 960 000 foyers, ce qui
représente un investissement estimé à 10 millions d'euros.
En juin 2007, l'Autorité nationale de
régulation a engagé un débat soumettant trois documents à la
consultation publique. En février 2008, le
Groupe de travail du secteur privé NGA-NGN a été créé
pour poursuivre les discussions relatives au passage, pour
l'opérateur historique, du réseau téléphonique public commuté
aux réseaux NGN.
République sudafricaine
En République sudafricaine, les
opérateurs mobiles Vodacom
et MTN, ainsi que
Neotel (deuxième opérateur national) ont décidé de
construire ensemble un réseau national longue distance en fibres
optiques de 5000 km dont le coût est estimé à environ 197
millions USD. Ils sont convenus de partager les coûts de
creusement des tranchées et de gestion du projet mais ils
devraient fournir leurs propres équipements en fibres optiques
et équipements de transmission.
La République sudafricaine, qui
accueille la Coupe du monde de la FIFA en 2010, compte sur les
progrès des communications mobiles 3G pour que chaque habitant
du pays puisse recevoir les programmes de télévision mobile sur
son téléphone portable et pour que les visiteurs venant du monde
entier puissent utiliser des services multimédias mobiles pour
envoyer des images et des séquences vidéo des matchs sur les
stades sudafricains. Dans l'intervalle, le «National
Broadband Forum» élabore actuellement un cadre pour la
stratégie du pays en matière de large bande.
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